
Manaré : « J'ai organisé ma première soirée dans un squat »
Il vient tout juste de passer le bac et de fêter ses 18 piges, l'âge légal pour être admissible dans un club en France. Sauf que Manaré Coly aka Riot Kid est bien né. Un papa guitariste de jazz et un grand frère producteur, ça permet de brûler pas mal d'étapes, à condition d'en faire bon usage. L'enfant émeute ne s'est pas privé.
Mis sur orbite par Booty Call et Ego6, repéré sur les bancs de l'école par Stunts (le label rap d'Institubes), Riot Kid vient également d'intégrer YounGunz, l'écurie pour pistoleros électro. Non content de cette réussite sur le plan artistique, il crée également sa propre soirée, en compagnie de son fidèle acolyte, Félix Magal : Make Some Noize.
Le jeune parisien sort aujourd'hui son premier maxi Calcutta 1946 et a accepté de répondre à nos questions. Profitons-en.
Street Tease : Raconte nous comment tu t'es orienté vers la musique, tu sembles avoir toujours baigné dedans via ton frère (aka Marvy Da Pimp ndlr) et apparemment ton père aussi ?
Riot Kid : Mon père était guitariste autodidacte dans des groupes de jazz et de musique africaine. Il a taffé avec Youssou N'Dour et le père Booba. Collectionneur de vinyles, il en possède plus de 3000 de jazz, funk, musique africaine et cubaine.
Mon frère à traversé de multiples périodes, métal, drum’n’bass, rap. Puis il s'est mis à mixer, scratcher, et à collectionner des musiques de film, et étant très influençable j'ai logiquement calqué.
En 6e, je m’endormais en écoutant la B.O du manga Cowboy Bebop, de Monstres & Cie, Harry Potter, ou encore des sons de Goldie, l'anglais de la jungle.
Quelles sont tes influences ?
Jazz, Funk, Musique Cubaine, Electro, de tout vraiment de tout. C’est ce que j'ai toujours essayé de retranscrire dans ma musique. C’est parfois difficile à gérer, mais l’important c’est qu’il en ressorte le métissage, l'éclectisme.
« J’ai organisé ma première soirée dans un squat à Maraîchers, mais la soirée s'est terminée a minuit à cause des CRS. C’est de là que vient mon nom : Riot Kid. »
Ce premier maxi s’appelle Calcutta 1946, peut-on savoir pourquoi ? Comment tu qualifierais la musique qu’on y retrouve ?
Le nom du maxi correspond a la localisation et a l'année d'une émeute. Le EP étant composé du son Darjeeling - lui même composé d'un sample de Ravi Shankaar - j'ai choisis un lieu géographique en rapport avec le son, et les évenements historiques qui en découlent.
Mon blaze étant Riot Kid, le nom de chacun de mes projets correspondra à l'année d'une émeute. “Paris Mai 1968” par exemple.
Avec quel matériel travailles-tu tes prods ?
J’ai commencé sur PC avec Fruity Loops puis Reason pendant 2 ans. Je produisais des sons grime et dubstep à ma manière, puis j'ai commencé à enregistrer des rappeurs dans ma chambre pour me faire de l'argent de poche ce qui m’a plongé dans le rap français et US.
A 14 ans j'ai commencé à traîner en club dans les soirées de mon frère : d'abord les soirées Ego6 au Nouveau Casino, puis les Bootycall qui m’ont fourré les oreilles dans Crookers et toutes ces conneries. C’est là que j’ai commencé l’electro.
J’ai produit ensuite le son No Justice, clippé par Luc Besson (grâce à Solo, un pote de mon frère et ex-membre d’Assassin). C’est lui qui m’a playlisté en premier, lors des TOXIC au Tryptik, avant de finalement me signer sur son label Black Frog. Je suis ensuite passé sur mac avec Logic, des VST, et toujours mon vieux clavier maitre !
Et les dj sets ?
J’ai débuté sur Virtual DJ avec un petit contrôleur.
J’ai ensuite rencontré Lazy Flow et Mikix the Cat, qui m’ont fait jouer aux disquaires via Bass Stars leur collectif.
C’est Florent (aka Lazy Flow ndlr) qui m’a initié au Sérato dont je suis devenu fou, j'ai tout de suite kiffé le concept qui alliait virtuel que je connaissais et gérais très bien, et les vinyles, continuité logique de mon éducation musicale.
« J'ai toujours traîné avec des gens plus âgés que moi. »
Ta première expérience en dj a eu lieu il y 1 an seulement en fait !
En 1 an, je suis passé d'un squat à Maraîchers à faire des soirées en province, à Bruxelles, Oslo ou encore de gros clubs tel que le Social Club et le Nouveau Casino à Paris. Je remercie mon frère pour ça et tous les "grands" qui ont toujours été là, Booty Call, Ego6...
Tu co-organises également les soirées Make Some Noize, comment en es-tu arrivé là ?
J’ai commencé par organiser ma première soirée dans un squat à Maraîchers, dans le 20e, on a printé 2000 flyers, qu’on a posé partout (facebook n’était pas encore d’actualité), et on s’est retrouvé avec 1000 personnes dans la salle, soirée terminée a minuit par une intervention de CRS.
C’est de là que vient Riot Kid, littéralement "l'enfant émeute", qui m’a été donné par Goblin, un des mecs d’Ego6 qui co-réalise Drugstore.
C’est lors de cette soirée que j’ai rencontré Félix Magal. Je me suis rendu compte ce soir là qu’il était aussi chelou que moi. Je savais que c’était le fils de la patronne du Point Ephémère, à force de traîner dans les pattes de mon grand frère j’ai assez rapidement compris quels étaient les ingrédients nécessaires d'une soirée réussie (La suite dans notre encadré).
Comment s’est fait la rencontre avec les membres de Stunts ?
Il m’arrivait de croiser Teki et Orgasmic au Social Club via les soirées de mon frère, qui en profitait pour me mettre en avant. J’ai pris les parts de The Good Guys que Marvy avait récupéré, et j’en ait fait une remix b-more que j'ai balancé à Gaga. Il a bien accroché et est passé chez moi pour qu’on le termine ensemble et qu’il écoute d’autres prods.
Quand j'ai fait Némésis, le projet Stunts était déja en route, tout le monde ou presque a validé et ils ont décidé de faire un gros son All Stars dessus !
Comment t’es tu adapté dans ce crew, dont beaucoup de membres ont presque 10 ans de plus que toi ?
J'ai toujours traîné avec des gens plus âgés que moi. Ça n’a donc pas été un problème de m'adapter. On ne traine pas ensemble tout les jours, mais j'ai l'impression de m'entendre plutôt bien avec tout le monde et quand il y a des dates on délire bien, c'est l'essentiel !
Entretien publié le 10 juillet 2009
Auteur : Corentin Grange
Photos : M•P•Y & Mar-One