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TEZ : « J'utilise ma voix comme un instrument »

Peu de chances de croiser Tez chez Paul Beuscher, son seul instrument, c’est sa voix, et avec elle, il sait tout faire. Tez est Humanbeatboxer, pour vous servir, révélé lors des 25 ans de Radio Nova, en novembre dernier au Grand Palais. Il a retourné les Nuits zébrées, grâce à ses beats & breaks 100% Bio. Depuis, son actualité n’a cessé de se densifier, pourvu qu’il ne soit pas enrhumé.

Street Tease : Tu es originaire de Laval, comment t’es-tu retrouvé à Paris à faire du son ?
Tez : Je suis monté à Paris pour les études, ça remonte à 5-6 ans. Je me suis mis à écouter du Hip Hop et j’ai commencé le beat box au lycée car ça me permettait de reproduire les sons que je kiffais à l’époque. Au début, sans croire en rien, juste parce que physiquement c’est plutôt marrant et que faire des bruits avec sa bouche, ça impressionne un peu. Je me suis servi de ma voix comme d’un instrument.

As-tu d’abord écouté des humanbeatboxers pour t’inspirer ou est-ce venu instinctivement ?
Au départ, tu peux difficilement échapper à Rahzel et aux Roots mais je me suis pas dit : « tiens je vais commencer le beat box, c’est fun », c’est venu plus naturellement, comme un prétexte pour faire de la musique.

Te souviens-tu des premiers morceaux de rap que tu as écouté ?
Je me rappelle du premier album du Wu Tang Clan (ndlr Enter the Wu Tang 36 chambers). Je suis pas trop Hip Hop français mais L’École du Micro d’Argent m’a mis une claque, complet, fini, avec des prods mortelles.

Plutôt vinyle, CD ou mp3 ?
J’écoute plus en format CD, maintenant quand je travaille, j’aime bien sampler les vinyles pour leur couleur. J’ai pas le matos d’un DJ, j’ai juste une vieille platine pourrie qu’un pote m’a prêté pour écouter ou sampler.

Tu as transformé ton chez-toi en home studio ?
J’ai commencé par enregistrer de petites tapes chez moi pour recueillir des avis extérieurs. Avant mon école d’ingé-son, je galérais avec les machines et puis j’ai fait des rencontres déterminantes, des mecs qui m’ont initié, conseillé.

Numérique ou Analogique ?
Aujourd’hui le moyen le plus facile et qui te coûte le moins cher, c’est de travailler sur un pc, mais j’ai quand même une MPC, une MC 202. J’aime bien le son analogique, Q-base ne remplace pas une vraie TB 303.

« Physiquement c’est plutôt marrant de faire des bruits avec sa bouche, ça impressionne un peu. Je me sers de ma voix comme d’un instrument. »

Gardes-tu de bons souvenirs de ta première scène ?
C’était à Laval, une scène ouverte organisée par un shop de vinyles qui venait d’ouvrir. Je me suis calé entre deux DJ’s qui voulaient juste un beat pour scratcher. Pendant longtemps, la scène a été un truc super dur pour moi mais le rapport avec le public est souvent positif.
Ma première scène parisienne, c’était lors d’un free style au Nouveau Casino où je m’étais incrusté. Sly du Saian était présent, j’étais pétrifié et c’est ma meuf qui m’a poussé à monter sur scène.

Que prépares-tu en ce moment ?
J’ai plusieurs projets, d’un côté, je fait des prods avec mes machines, un ordi et la partie beat box en live que j’essaye d’enregistrer. J’essaye d’utiliser ma voix pour n'importe quel son.

Peux-tu nous dévoiler une facette de ton processus de création, à partir d’un son, d’un beat par dessus lequel tu poses ta voix ; comment travailles-tu ?
C’est un peu délicat, dans une optique live, c’est complètement différent d’un morceau travaillé en studio, je me lâche pas mal aux idées qui viennent, à partir d’une routine. J’essaye de construire autour d’une mélodie et d’un beat qui sonnent puissant. Sur Head Attack , c’est comme si je faisais une prod avec des machines sauf que la banque de sons que j’utilise, c’est ma propre voix. Je me séquence pour donner plus de patate au son car en beat box, tu peux pas remplir tout l’espace sonore, l’échelle de fréquence est limitée.

Quelle est la réaction du public sur tes premières parties (avec Cocorosie ndlr) , exercice peu évident puisque les gens ne viennent généralement que pour la tête d’affiche ?
Généralement, le beat box, ça fonctionne plutôt bien. Nos univers sont très différents mais l’alchimie s’opère car elles sont super éclectiques (ndlr Cocorosie), tout comme leur public.

Qu’est ce que tu écoutes en ce moment ?
Je me prends des grosses claques du Michael Jackson période Dangerous/History, des morceaux comme Jam, Scream, Why you wanna trip on me sont très électro. Pour moi, un des plus gros breaks de musique électronique est celui de Streetwalker (ndlr un inédit de Bad, figurant sur la réédition de l’album sorti en 2001). Je l’ai écouté des milliers de fois, tu prends une baffe.
J’écoute beaucoup ce qui se fait France en ce moment, les productions des labels Institubes et Ed Banger. Ils ont des artistes qui défoncent comme Surkin et Para One sur Institubes, ou Sebastian, ses maxis sont abusés, ou encore Oizo de l’écurie Ed Banger. Je commence à me diriger vers la musique qui fait danser.

Entretien publié le 11 juillet 2007

Auteur : @FrancoisChe
Photos : Mpy Was Here