
Rockin' Squat : « L'école et les médias manipulent l'histoire des religions »
Vous le croyiez perdu pour toujours au fin fond de la forêt amazonienne ? Passé maitre dans l’art du grand écart entre le Brésil, les Etats-Unis et la France, Rockin’ Squat publie aujourd'hui son premier album solo Les Confessions d'un enfant du siècle : un disque brut et sans concession. Prêt à tout pour défendre ses idées, et sans renier son penchant pour la théorie du complot, l'ex-Assasin ne craint pas de se mettre à dos une partie de ses fans.
Ses confessions, réalisées entre Rio de Janeiro, New York, Paris, Sao Paulo et Salvador, dansent sur les rythmes de la sono mondiale. Une diversité musicale qui convient bien au MC.
« Mes diverses couleurs musicales viennent des endroits du globe où je compose. Et puis ça vient aussi de toute la richesse musicale que j’ai au fond de moi. Pour moi, le hip-hop a toujours été le patrimoine de toutes les musiques. J’ai toujours big up le rock, la soul, le reggae, le jazz, la salsa, la samba, la bossa nova. Ça vient aussi du fait de voyager, de me retrouver avec de plus en plus de musiciens autour de moi, d’artistes qui appréhendent la musique comme moi, de façon naturelle, pas du tout guidée par la société de consommation ni par la réussite personnelle. »
Un rappeur engagé et contestataire
Au niveau des textes aussi, on découvre des changements. Squat lève le voile sur sa vie privée. Il parle même amour sur Te Amo… Eu Quero Voce et Aimer Sans Posséder. Un effet du temps ? Peut-être. Mais surtout un effet « album solo ». Assassin n’était pas vraiment un groupe qui donnait dans le sentiment. Et comme on ne se départit jamais de ses racines, il lui est impossible d’expliquer la genèse de ce nouvel album sans revenir sur l’histoire du groupe.
« La manipulation existe depuis l’école, en passant par les médias, la manière dont on a écrit l’histoire, la manipulation des religions... »
« De mon point de vue, en France, on n’a pas de culture musicale. On est de culture littéraire. Quand le hip-hop est arrivé dans ce pays, il fallait laisser la marque d’un groupe sérieux. C’est ce qu’on a fait avec Assassin. Je m’interdisais donc de sortir des titres autres que sociaux, politiques ou culturels. Il fallait amener des bases solides à notre mouvement. Pour qu’on ait aussi, en regardant notre histoire derrière nous, des groupes comme Public Ennemy. Pour Assassin, c’était important de mettre ce coffre dans notre musique. Et maintenant que c’est devenu une culture ici [même si on est encore sur une jambe d'après moi] je peux me permettre de m’ouvrir dans mon album solo, de parler histoires d’amour. Et puis j’en ai besoin. De faire des morceaux pour ma famille, pour les gens que je vois tous les jours… Tous ces morceaux que je leur rappe dans les oreilles depuis toujours… »
D’où le titre Enfant de la Balle, où le fils qu’on savait Cassel parle de sa famille sans voile ni détour. Quinze ans pour écrire un morceau aussi personnel. Pas vraiment pour une histoire de pudeur. Juste parce que l’utilité n’était pas là :
« Je suis rentré dans le rap pour ce truc de contestation, de contre-culture et c’est ça qui m’a formé. Je suis autodidacte depuis l’âge de huit ans. Là on a quelques parcelles de ma vie mais je n’ai pas tout raconté et je ne le ferai jamais. Ma famille, je ne m’en suis jamais caché. Je dédicaçais déjà à mon frère sur mon premier morceau, La Formule Secrète. C’est juste que la carte de visite genre « voilà ma vie », ce n’est pas la mienne. Enfant de La Balle a été écrit avant que notre père parte. On l’a perdu il n’y a pas longtemps. C’était donc important de laisser des traces. J’ai toujours aimé tous les membres de ma famille, on n’a jamais eu de confrontations. On a tous grandi artistiquement, on s’est toujours bien retrouvé, on est épanoui, équilibrés. Aujourd’hui, je pense qu’une partie de mon public a aussi le droit de savoir que tout va bien. »
Théorie du complot, illuminati, mensonge organisé
Rockin’ Squat n’a rien perdu de son esprit contestataire, voire borderline. Bien au contraire. Sur Démocratie Fasciste : Article 3 feat Médine, Free Them All ! Squat dédicace à tous les prisonniers politiques et dans France A Fric, Vie Privée, c'est la presse qui charge. Et puis entre deux réponses à notre interview, le MC improvise un coin lecture. En plus de nous recommander de cliquer sur Infowars.com, le site internet du très controversé Alex Jones, adepte des théories complotistes, les ouvrages des non moins controversés David Icke et de Jordan Maxwell sont également au programme. Nouvel ordre mondial, illuminati, mensonge organisé, Dieudonné... Tout y passe. Du côté des opprimés, le rappeur engagé ne craint pas de défendre ses idées, quitte à se mettre à dos une partie des fans d'Assassin. Un scepticisme sans limites.
« “A luta continua” comme on dit au Brésil. Plus que jamais. Et de toute façon plus cette élite qui est au pouvoir continuera à contrôler le monde et plus on se retrouvera nous, gens du peuple à être oppressés et à ne rien comprendre. Parce que la manipulation elle est là, depuis l’école, en passant par les médias, la manière dont on a écrit l’histoire, la manipulation des religions. Retrouver les vérités du monde dans lequel on vit est un travail de tout instant. C’est un luxe aujourd’hui d’avoir le temps de chercher cette vérité parce qu’on est tous à courir après l’argent. Parce que sans argent, tu meurs. »
Article publié le 7 novembre 2008.
Auteur : Adeline Lajoinie
Photos : Droits Réservés